Lundi 12 octobre 2015, j’ouvre les yeux dans la chaleur moite de ma chambre ; réveillée par la lumière qui perce à travers les minces rideaux de coton. Je m’apprête à entamer la deuxième semaine de mon volontariat à Bali et à entrer dans le vif du sujet : donner des cours. La pression est à son comble – et je peux vous dire qu’en terme de pression, je sais bien me la mettre. Je rejoins Poppy, la jeune fille qui fera classe avec moi, dans le bâtiment principal de Green Lion.
Je l’écoute parler de son projet, du pourquoi du comment de sa présence ici, avec son joli accent britannique si sophistiqué. On prépare le cours de l’après-midi, celui où l’on rencontrera les enfants pour la première fois. Dans ma tête, mille milliards de questions se bousculent. Encore.
Ma peur de ne pas être à la hauteur revient au galop : je ne sais pas à quoi m’attendre, comment allons-nous être accueillies, comment devons-nous nous comporter, et puis si les enfants ne m’aimaient pas ? Si je n’y arrivais pas ? Questions sans doute égoïstes.
On vient nous chercher à 13h30 et l’on monte dans le taxi avec deux autres filles qui feront classe à d’autres enfants de la même école. Lorsque l’on arrive, un essaim de petites abeilles souriantes se ruent sur nous. Ils nous demandent nos prénoms, rient, veulent nous prendre par la main, crient, certains sont déjà installés derrière leurs pupitres, chahutent.
Comme je vous le disais ici, les cours d’anglais ne sont pas obligatoires. Les enfants ne portent donc pas leurs uniformes ; et au fur et à mesure de la semaine, je remarque que les visages face à nous ne sont pas toujours les mêmes. Nous essayons d’installer le calme et d’instaurer quelques règles en écrivant au tableau quatre ou cinq mots de bahasa : silence, rester assis, lever la main avant de prendre la parole, etc.
La porte reste ouverte sur la cours de récréation et de temps en temps, un enfant débarque en hurlant ou en vélo. Difficile de faire classe dans une ambiance si peu propice au travail.
On cherche un coordinateur pour nous épauler ; sa présence fait autorité et le silence – relatif – finira par régner. On constate que leur niveau d’anglais n’est pas celui que l’on nous avait indiqué et on revoit notre petit programme de la journée au profit de leçons plus simples.
Les 2h30 passent rapidement mais je ne suis pas mécontente lorsque la fin des cours est sonnée. C’était pour le moins laborieux de ne serait-ce que leur apprendre à se présenter en anglais : qu’ont-ils fait avec les autres volontaires ? Ils ne comprennent pas ce que l’on dit, nous ne les comprenons pas non plus. La barrière de la langue est extrêmement frustrante mais il va falloir la dépasser.
Le lendemain est un jour de cérémonie religieuse et il n’y a pas école. Il y en a très souvent à Bali pour des motifs bien divers qui apparemment varient d’une communauté à l’autre ; et avec quelques filles de la maison des volontaires, nous en profitons pour partir visiter le nord de l’île accompagnées par l’un des chauffeurs de taxi qui nous emmènent habituellement dans les écoles d’Ubud.
Départ à 8h pour la découverte d’une plantation de café et de thé, nous passons un bon moment en dégustant différents thés guidées par une adorable jeune femme qui nous explique les bienfaits de tel ou tel mélange.
Plus loin, une vieille dame est assise près d’un feu, affairée à torréfier les graines du fameux café le plus cher du monde : le Kopi Luwak. Entre 20 et 50 € la tasse tout de même.
Je n’étais pas au courant, je ne savais pas ce que c’était et à la lumière des explications que l’on a reçues, je comprends que ce café est à la fois le fruit (c’est le cas de le dire, vous verrez) d’un processus, disons, peu ragoûtant et surtout, cruel. A mon retour, je lis cet article qui confirme mes craintes ; et il était impensable que je ne vous en parle pas.
Donc, pour faire du Kopi Luwak, nous avons tout d’abord besoin d’une civette – mais plusieurs c’est mieux, on est pas là pour enfiler des perles les gars. On gave ensuite ce petit animal nocturne qui ressemble à un gros chat ou une grosse belette avec des baies de caféier. Pourquoi ? Parce que la civette digère la pulpe mais pas le grain, le rejetant ainsi par la voie la plus naturelle qui soit : son trou de b… Ses excréments. Ses excréments.
Avec le succès croissant de ce café, on est passé d’une production rurale à une production massive en quelques années. On enferme ces pauvres civettes dans de petites cages à peine à l’abri de la lumière du jour et on les nourrit quasi exclusivement de baies.
Ce n’est pas sans rappeler la misérable vie de nos oies productrices de foies gras. Les associations de bien-être animal ont remonté des problèmes d’hygiène et de maladies ainsi que des soucis comportementaux tels que le stress intense lié aux espaces exigus dans lesquels ils sont maintenus, l’auto-mutilation, etc. Il y a tant de belles choses à voir, à expérimenter et à goûter sur cette île qu’il ne me paraît pas bien compliqué de boycotter une telle production.
Pour aller plus loin, n’hésitez pas à lire cet article et surtout, à en parler autour de vous, particulièrement auprès de personnes qui prévoient un voyage en Indonésie ou dans les Philippines où l’on trouve aussi du Kopi Luwak. Buvez plutôt des smoothies ou des jus de fruits, c’est bien les fruits aussi.
On a ensuite repris la route en direction des rizières de Jatiluwih étalées sur plus de 19 500 hectares et classées au Patrimoine mondial de l’UNESCO. Des rizières, il y en a partout sur l’île et si aujourd’hui, c’est avant tout le tourisme qui fait prospérer l’économie balinaise, la culture du riz a longtemps été la première ressource économique de ses habitants. A Jatiluwih – contrairement à la plupart des autres rizières – on cultive des variétés de riz traditionnelles qui mettent deux fois plus de temps à arriver à maturité.
C’est le système d’irrigation en terrasses, subak, qui a été reconnu par l’UNESCO.
Si vous vous en souvenez, je vous expliquais ici que les maisons étaient construites dans un soucis d’équilibre entre le bien et le mal, le monde des dieux et celui des hommes. Pour les rizières, c’est un peu pareil. Les subak ont été pensés pour que se répartissent équitablement les énergies entre les dieux, les hommes et la nature – soit la philosophie dite Tri Hita Karana. Ce système est garant d’une excellente gestion de l’eau, celle qui provient des différentes sources chaudes de la région, des montagnes, des lacs et des temples.
La vue depuis la route qui longe les rizières est sublime et ce jour-là, les nuages accrochées à la montagne donnaient une atmosphère dramatique plutôt photogénique. Nous n’avons pas pris le temps de nous promener à travers les cultures ; il faudra revenir !
On remonte dans le taxi pour se diriger vers Munduk dont les alentours sont célèbres pour ses belles randonnées jalonnées ou récompensées de cascades. Le climat y est assez différent : plus frais, plus capricieux et pluvieux. On s’arrête d’abord dans un hot spring principalement fréquenté par les autochtones : Sumber Air Panas Angseri. On se glisse – littéralement, les bords du bassin étaient vaseux – dans l’eau chaude et trouble, je ne peux pas m’empêcher de penser à la sensation de quand je faisais pipi dans la mer (ou la piscine, soyons honnête) petite – vous noterez l’utilisation de l’imparfait et la précision « petite » hein.
On y fera pas vraiment long feu. Avant d’arriver à Munduk, nous faisons quelques haltes au bord de la route pour observer le paysage. Je reste souvent seule pour faire des photos ; notre chauffeur s’approche et me dit : you’re a quiet girl right ? On entame alors une discussion sur le besoin de solitude, sur le silence avant de digresser peu à peu sur l’amour. Il me parle de sa femme et de ses enfants, de comment il l’a demandée en mariage, à quel point il est heureux de l’avoir dans sa vie et de la maison qu’il a fait construire pour sa famille.
Ce sont précisément ces moments de partage avec de parfaits inconnus qui m’ont donné l’envie de voyager seule à nouveau. Ou en tout cas de davantage m’ouvrir aux autres, d’écouter leurs histoires et de cesser de croire que j’étais trop sauvage, timide, misanthrope ou que sais-je pour ces choses-là.
Les voyages, à mon sens, ne doivent pas être faits seulement de beaux paysages et d’instants partagés entre proches. Ce sont aussi de merveilleuses occasions de faire de jolies rencontres, d’échanger avec des gens que l’on aurait certainement jamais croisés autrement ; et lorsque l’on est seul, on saisit plus facilement ces opportunités-là en se disant que c’est dommage de ne pas l’avoir fait avant. C’est l’une des leçons que j’ai retenue de cette expérience.
On arrive à la cascade la plus photographiée de la région et pour cause, elle est facilement accessible après une petite marche d’un peu moins d’un kilomètre. Je me sens très frustrée de ne pas pouvoir explorer plus les environs et faire une randonnée pour découvrir d’autres chutes d’eau. Ce day trip a un petit goût de trop peu, tout est fait au pas de charge soit l’exact inverse de la façon dont j’aime voyager.
Certes, il a permis d’avoir un aperçu global d’une partie du nord de l’île et j’ai adoré ce que j’ai vu mais j’aurais préféré en voir moins mais mieux. A peine le temps de prendre des photos, on rebrousse chemin pour le Pura Ulun Danu Bratan, le temple au bord du lac Bratan. L’entrée se monnaye quelques 30 000 roupies soit un peu plus de 2 € et l’on nous prête des sarong pour couvrir nos jambes. Si vous avez bien tout suivi depuis le début, la journée est consacrée à une cérémonie religieuse, le temple est donc plein à craquer.
La foule me décourage, je prends une seule photo et j’ai du mal à profiter du lieu pourtant superbe. D’autant plus que nous sommes régulièrement arrêtées par des indonésiens qui veulent se photographier à nos côtés. On se prête au jeu mais à la longue, c’est pesant.
La journée s’achève sur cette visite. Il est un peu plus de 17h lorsque l’on arrive à Ubud. La nuit commence déjà à tomber peu à peu ; on décide d’aller manger au Kopi Desa qui deviendra avec le Banana Leaf et le Café Vespa notre spot favori. Chaque mercredi soir, on s’y retrouvait pour la soirée cinéma – je ne vous raconte pas la chiale quand ils ont passé Hatchi, j’ai la gorge serrée rien que d’y penser.
C’était un endroit que l’on aimait bien, on y allait autant pour boire une tisane de citronnelle que des cocktails, pour manger des gâteaux ou des mie goreng.
Comme au Banana Leaf, on y a pris nos marques. Les gens nous reconnaissaient, on sympathisait ; c’était chouette de se créer des petites habitudes à des milliers de kilomètres de chez nous.
En sortant vers 21h, les rues étaient désertes. Seuls les chiens et quelques hommes traînaient dehors ; on ne voit guère de femmes passée une certaine heure alors forcément, notre présence est remarquée – bien qu’ils doivent avoir l’habitude avec les touristes et les volontaires. Les indonésiens sont toujours restés courtois me concernant. Bien-sûr, en voyageant seule, j’avais peur d’être enquiquinée pour dire ça poliment mais je me suis toujours sentie respectée et en sécurité.
Autant vous dire que le retour en France, et notamment dans les transports parisiens que j’ai pris quelques jours après et où un type a cru bon de toucher mon genou pour attirer mon attention m’ont donné envie de repartir illico presto. C’est quoi notre problème sérieusement ?
La semaine à l’école s’est relativement bien déroulée. Avec Poppy, nous avions décidé de laisser plus de place aux activités ludiques, voyant que les enfants n’étaient pas plus réceptifs que ça aux méthodes d’enseignements classiques. On jouait pas mal avec eux, on les faisait dessiner, et on essayait de faire en sorte qu’ils aient des interactions entre eux en anglais. Pas toujours facile.
Comme il s’agirait de ne pas se répéter et que je vous ai déjà tout expliqué sur le déroulement des journées et mes impressions globales sur mon volontariat et son utilité, je vous renvoie au premier article que j’ai écrit, juste ici.
Le week-end, je partais seule une nouvelle fois en jetant mon dévolu sur la péninsule de Bukit. Je fis d’abord une halte chez mon amie Orianne, à Sanur. Cinq ans que nous ne nous étions pas vues. C’était si émouvant de voir son visage lorsqu’elle m’a ouvert le portail : je n’aurais jamais cru la revoir dans un tel contexte !
Nous avons passé l’après-midi ensemble en essayant vainement de rattraper le temps perdu ; elle m’a préparé des pâtes au tofu et au piment, j’ai rencontré son mari japonais, on a eu des discussions à moitié en français, à moitié en anglais, on a rit, elle m’a prise dans ses bras et je me suis faite piquer par des fourmis rouges dans son jardin – ça brûle drôlement.
Je repense avec beaucoup de nostalgie à ces moments ; quand je me suis rendue compte surtout de la chance que j’avais d’être entourée d’amis aussi inspirants qu’elle.
De personnes qui ont des rêves et qui les concrétisent, qui ne se laissent pas happer par la routine, qui n’oublient pas de se réaliser en somme et qui me rappellent à leur manière que la vie, c’est maintenant.
J’étais tellement dans la lune en repartant, que j’en ai oublié mon appareil photo chez elle. Et bien-sûr, je m’en suis aperçu une fois arrivée à l’hôtel à Uluwatu sinon ça aurait beaucoup moins rigolo. Mais tout est bien qui finit bien et avec l’aide d’Orianne, mon précieux était dans mon sac le lendemain matin pour partir à la découverte de la péninsule connue pour son temple et ses spots de surf.
J’ai dormi au De Sapphire Cliff Villa, un hôtel perché sur les falaises où l’on loue des villas pour presque rien – 60 € la nuit si je me souviens bien. Au-delà du confort, de la maison sur deux étages rien que moi, de l’immense lit à baldaquin et du balcon avec vue sur l’océan ; ce qui m’a surtout séduite, c’était de m’endormir et me réveiller la fenêtre ouverte, en écoutant la rumeur des vagues qui s’écrasaient contre les rochers un peu plus bas. Je vendrais ma mère pour revivre ça – pardon maman.
A Bali, j’ai pris l’habitude de me lever très tôt : pour voir les levers de soleil qui sont, tout comme les couchers, sublimes. J’ai ensuite enfilé mon maillot de bain pour aller me baigner dans la piscine vide avant de prendre mon petit-déjeuner. J’étais installée face à l’océan et je terminais ma salade de fruits en griffonnant sur mon journal de voyage lorsqu’une jolie femme qui portait un large chapeau de paille visé sur une chevelure tressée m’a abordée.
Elle s’est présentée : elle s’appelait Dori, elle venait de Floride, elle avait 58 ans, c’était son premier voyage en solitaire elle aussi, elle était à Bali car son fils jouait dans un groupe de rock dans les bars de Jakarta depuis plusieurs années, elle ne l’avait pas vu depuis 3 ans et sa future belle-fille lui avait offert une semaine sur l’île avec un chauffeur attitré.
Elle m’a proposé de l’accompagner visiter le Pura Luhur Uluwatu, le temple à flanc de falaise très connu et photographié. J’ai hésité quelques instants : et si c’était une dangereuse criminelle recherchée par Interpol ? Et puis, j’ai convenu avec moi-même que c’était une pensée tout à fait ridicule et j’ai accepté sa proposition.
C’était un véritable moulin à paroles, tout l’enthousiasmait, elle posait mille questions au chauffeur et me racontait sa vie comme si on se connaissait depuis toujours. C’était drôle d’être assise dans une voiture à côté d’une femme que j’avais rencontrée quelques heures plus tôt et qui désormais me parlait de son petit fils Doster, de ses boucles blondes et de ses dents de lait.
Nous sommes arrivés au temple en fin d’après-midi. La lumière commençait à se faire plus douce, je laissais Dori et le chauffeur de taxi me précéder pendant que j’admirais l’océan Indien se soulever et former des vagues impressionnantes. Je compris pourquoi des milliers de surfeurs du monde entier se pressaient pour venir surfer les rouleaux infinis d’Uluwatu.
Les contrastes entre le camaïeu de bleus de l’eau et du ciel, et le camaïeu de verts de la végétation autour de nous étaient superbes. Il y avait aussi les petits singes chapardeurs, les frangipaniers et leur parfum, le son des vagues, etc. C’est un endroit que j’ai beaucoup aimé et qui, malgré les touristes omniprésents, a gardé une certaine authenticité. Je dis peut-être ça car le cadre est unique et enchanteur mais je ne peux que vous conseiller d’y aller.
A la tombée de la nuit, chaque soir, il est possible de rester regarder un spectacle de kecak – c’est compris dans le prix de l’entrée il me semble. C’était la deuxième fois pour moi après celui la semaine précédente à Ubud et je vous avoue m’être un peu ennuyée. Toutefois, l’enthousiasme de Dori était communicatif. A côté de nous, un groupe d’indonésiens s’agitait. Je remarque que l’un d’entre eux essaie de faire un selfie en m’incluant dans sa photo.
Je lui lance mon regard le plus doux et affable qui soit et plutôt que de le décourager, il me montre son téléphone et ouvre son bras pour me montrer qu’il veut que l’on se photographie ensemble. Je n’arrive pas à dire non et puisqu’il a montré l’exemple à tous ses copains, c’est un défilé de téléphones. Moi, ma gêne et mon sourire crispé étions ravis.
C’est arrivé de nombreuses fois pendant mon voyage : des jeunes, des vieux, des hommes, des femmes, des familles. Je pose donc une vraie question et si jamais vous avez la réponse, n’hésitez pas à m’en faire part en commentaires : pourquoi ? à quoi ça sert ?
De retour à l’hôtel, nous dînons ensemble. Il fait nuit, le ciel est parfaitement dégagé et incroyablement étoilé. On discute des hasards de la vie, des coïncidences, des énergies qui circulent, qui font que certaines personnes s’attirent et se découvrent de nombreux points communs. C’était vrai pour Dori et moi dans une moindre mesure : nos premiers voyages en solitaire respectifs, elle était végétarienne, concernée par la cause animale ; quelles étaient les chances pour que l’on se retrouve au même moment, au même endroit et que l’on ait tant de choses à partager ? Pourtant, son discours ne résonnait pas tellement en moi à l’époque.
Elle m’a parlé de karma, de cheminements qui font que souvent tu rencontres les bonnes personnes aux bons moments et que tout arrive parce que tes choix ont crée un contexte favorable, ou pas. Un mot pour définir les liens de causes à effets en somme.
Je ne crois pas en la destinée, je ne crois pas que tout arrive pour une bonne raison (allez dire ça aux gens qui sont malades, aux personnes qui ont vécu d’importants traumatismes : je trouve qu’il n’y a rien de plus agaçant que d’entendre que c’était une épreuve par laquelle ils devaient passer ; non, non et non). Néanmoins, aujourd’hui, je dois dire que ma vie a tellement changé depuis ce voyage et depuis que j’ai eu le courage de faire de vrais choix, que je ne peux m’empêcher de repenser à ses paroles sur les bonnes rencontres aux bons moments.
Et si les choses positives n’arrivaient que parce que l’on était prêt à les accueillir ? Le hasard n’est peut-être pas si hasardeux après tout. J’aimerais bien reparler de tout ça avec Dori autour d’un plat de nachos tiens !
Le lendemain matin, elle m’a proposé que l’on aille ensemble voir le célèbre spot de surf d’Uluwatu avant d’aller se baigner à Padang Padang Beach. J’ai bien-sûr approuvé son offre par un grand sourire qui ne pouvait dire que oui et l’on a marché en suivant les scooters équipés d’un porte planche de surf. En arrivant, nul doute n’était possible. Des surfeurs partout, certains occupés à waxer leur planche, d’autres revenaient de l’océan quand d’autres y descendaient, d’autres enfin observaient depuis une grande terrasse ceux à l’eau et nous les avons imités.
C’était fascinant. J’aurais pu rester là des heures à regarder les vagues se dérouler à l’infini et les petites silhouettes qui, d’où nous étions ressemblaient à des pastilles noires, attendre patiemment la suivante.
Nous sommes ensuite descendues voir l’entrée, connue pour être assez dangereuse. L’eau était sublime mais il y avait beaucoup de courant, les vagues sont puissantes et les fonds peuplés de coraux coupants. Ne surfe pas à Uluwatu qui veut.
Padang Padang Beach est une crique très touristique et caractéristique avec ses gros rochers. L’eau est comme à Uluwatu, merveilleusement bleu et limpide. Les fonds ne font pas exception : on a vite plus pied ou alors, il rencontre une grosse pierre ou deux, et les vagues ne font pas dans la dentelle. Je n’ai pas trouvé qu’il était agréable de s’y baigner contrairement à Gili Air.
Nous n’y sommes pas restées longtemps puisque nous devions faire le checkout à l’hôtel à midi. Nous avions juste le temps de prendre une douche et de boucler nos valises. Dori m’a accompagnée jusqu’à Ubud avec son chauffeur de taxi qui nous a emmenées dans un restaurant pour le déjeuner dont je me souviendrai encore longtemps : Kayun.
On s’est installées en tailleur autour d’une table à l’extérieur, dans un petit jardin parfait décoré de statues et où plusieurs fontaines conféraient à l’endroit une atmosphère relaxante. Nous avons commandé des jus de fruits frais, des frites de patates douces, et deux nasi goreng. C’était délicieux et Dori a lancé une discussion sur l’alimentation crue. Elle m’a dit qu’elle se nourrissait presque uniquement d’aliments non-cuits ou très peu depuis 2009 et que ça lui avait changé la vie, à elle et son mari.
Je crois qu’elle a passé une bonne trentaine de minutes à me dresser la liste des avantages à manger cru ; quand soudain elle m’a regardée d’un air entendu et m’a chuchoté à l’oreille : sex is so much better when you eat raw !
En soulignant sa phrase d’un poing serré tendu vers moi, les muscles de son avant-bras bandés, si j’ose dire. C’était gênant et drôle à la fois.
Nous sommes restées là-bas toute l’après-midi. Elle m’a montré des photos d’elle jeune lorsqu’elle s’est mariée avec son amoureux à l’âge de 19 ans, elle m’a raconté leur rencontre au lycée, leur jardin en Floride, etc. J’aimais bien sa personnalité si expansive et spontanée. Je lui ai parlé de mon volontariat et elle m’a demandé ce que j’allais faire de cette expérience une fois que je serai rentrée ; si l’on se revoyait aujourd’hui, j’en aurais des choses à lui dire.
Comme tous les clients étaient partis et que seul un petit chat nous tenait compagnie, le chef du restaurant s’est joint à nous. C’était un indonésien avec de très jolis traits et des yeux bleus perturbants – de toute façon, je trouve toujours le regard des gens qui ont les yeux très clairs difficile à soutenir – mais ça l’était encore plus ici. Il avait 38 ans et en paraissait 10 de moins. Il a parlé de son régime alimentaire et je vous le donne en mille, de raw food !
Pendant que Dori et lui débattaient sur les meilleures fèves de cacao, j’ai été acheter des gousses de vanille et de l’huile de coco à la boutique du restaurant : leur parfum et leurs saveurs, inégalables. Il était l’heure de rentrer. Dori m’a accompagnée jusqu’à la maison des volontaires, on s’est dit au revoir dans la voiture et j’avais un peu le cœur lourd de me dire que je ne la reverrai certainement jamais. Elle est l’une de mes plus jolies rencontres à Bali.
C’est sur ces mots que je vais conclure cet article encore mille fois trop long (j’ai quand même fait 500 mots de moins que la dernière fois, hey) mais vous êtes nombreuses à m’avoir encouragée à continuer d’écrire longuement : je vous ai écoutées vous voyez – bon, ce n’est pas non plus comme si je me forçais. J’espère que ce troisième récit vous a plu ; je prépare rapidement le quatrième et dernier article consacré à mon volontariat à Bali, on pourra ainsi passer à autre chose ;)
En attendant, je vous souhaite une très belle fin de semaine et un bon week-end. A bientôt !
Gee
C’est très beau ce que tu racontes de ta rencontre avec Dori. On sent comme au fur et à mesure de vos discussions, tu te laisses aller comme si vous vous connaissiez depuis toujours. On sent que vous avez noué une relation très forte. Comme quoi voyager seul, apporte une réelle ouverture. Ça me donnerait bien envie de tenter l’expérience à mon tour
Hâte de lire ton prochain article!
LaëtitiaAutrice
Coucou :) Je ne dirai pas que l’on avait noué une relation très forte, disons que c’était plutôt bref, intense et intéressant. Mais oui, voyager seul est un enseignement très riche et fulgurant même ! Je te souhaite de le faire un jour :)
Ophélie G.
Je te trouve tellement courageuse d’être partie toute seule aussi loin, mais surtout d’avoir trouvé la force de t’ouvrir aux autres.
Une fois encore, le récit de cette semaine me fait rêver. J’ai hâte de lire le prochain ! xx
LaëtitiaAutrice
Merci Ophélie ! En fait, je crois sincèrement que l’on est tous capable de partir seul et de sortir de cette fameuse zone de confort qui est rassurante mais handicapante ; le plus difficile, c’est d’avoir la première impulsion, le déclic :)
Leslie - Tache de Rousseur
Ahh je suis triste que tu n’aies pas écris cet article il y a un mois ! Je reviens d’un mois d’Indonésie (tes précédents articles m’ayant donné envie) et j’aurais bien testé tes adresses. Dommage :(
Sinon concernant ta déception de ne pas aoir vu assez la côte nord : nous avons passé une semaine entre Lovina et Munduk et c’est de loin ce que nous avons le moins aimé à Bali. La plage de Lovina est sale et à Munduk il faisait très froid, les cascades sont certes très jolies mais tu en as vu une tu en as vu 100 (nous avons fait la rando). Ubud reste mon coup de coeur, par contre je n’ai pas vu les rizières dont tu parles, elles avient l’air splendides !
En Indonésie les gens sont très ouverts je trouve. Bien qu’en couple nous avons rencontré plein de gens, beaucoup de voyageurs en solo, avec qui nous sommes restés parfois quelques jours et c’est bien agréable de pouvoir parler ainsi à de parfaits inconnus. Tu me diras, ça m’arrive aussi très souvent dans le train (j’ai un petit chien très mignon, forcément ça casse les barrières ;) ) mais les gens en France sont beaucoup plus égo-centrés je trouve. En tout cas je prends moins de plaisir à les écouter me raconter leur vie (notamment cette dame dans le train hier qui m’a sorti du « Moi je suis comme ça, moi j’aide les gens » pendant 3h15…).
Bref, j’en termine avec ce long commentaire. Merci pour ton partage et tes photos sont magnifiques comme toujours !!
LaëtitiaAutrice
Oh mince, je suis désolée – quand c’est comme ça, il ne faut pas hésiter à m’envoyer un petit mail, je prends toujours le temps d’y répondre assez rapidement :) Pour Munduk, j’en ai entendu beaucoup de bien et puis, j’aime la randonnée, les forêts, tout ça. Du coup, j’aurais vraiment adoré en voir plus ! Je regrette aussi de ne pas avoir pu aller à Amed mais je n’étais pas là-bas pour les vacances, donc il faudra y retourner ^_^
J’ai aussi trouvé les gens très ouverts là-bas, ils ont tout à fait une autre mentalité et c’est rafraîchissant ! Tellement moins individualistes que nous…
En Mode Bonheur
Il mérite amplement sa longueur. Ok j’ai sauté deux trois passages mais il est vraiment passionnant, enrichissant, personnel. Tu as vécu une expérience incroyable et ça se ressent.
Merci pour le passage sur le café… Effectivement bien dégueu et assez honteux…
Même si effectivement ça n’a pas l’air facile tous les jours, ça donne envie de tenter l’expérience :)
Julie
LaëtitiaAutrice
Merci Julie pour ton commentaire ; ça me fait plaisir de lire que tu as apprécié la lecture de cet article :) A bientôt !
Mythily GeeketteCuisine
Cet article me donne (encore et toujours) plus envie d’en apprendre plus sur ton volontariat et surtout ton voyage en solo !
Article long mais tellement bien écrit que je n’ai pas vu le temps passé !
Merci à toi de partager avec nous ces délicieux moments de vie <3
julycocoon
J’adore, je me croirais dans un roman à suivre ton périple à travers tes jolis mots et les photos qui le ponctuent subtilement !
LaëtitiaAutrice
Oh merci <3 <3 <3
Liilice
Comme j’aime te lire Laëtitia… Je suis comme toi, comme tu étais plutôt, « trop timide, trop sauvage » et en lisant ton expérience je me dis que je suis bien bête et que je dois passer à côté de beaux moments à cause de ça… Et cette rencontre avec Dori qui donne envie de partir seule, au moins une fois, au moins pour essayer, pour ne pas regretter. Et puis ton amie Orianne qui rappelle qu’il faut aller au bout ses envies… Et puis la photo de cette dame qui torréfie le café…
Merci pour cet article si inspirant ♡ des bisous
LaëtitiaAutrice
Merci du fond du cœur pour ton gentil mot Alice, ça me touche encore plus venant de toi car j’aime beaucoup ton regard sur les choses et ta sensibilité dont je me sens assez proche :) Je ne dirai pas qu’aujourd’hui je suis moins timide (il faut encore que je me fasse violence pour plein de choses) mais ça m’a appris l’ouverture aux autres, être plus avenante, plus souriante, … Ça fait du bien à tout le monde :)
Maïté DM
Ton article est très touchant. Il m’a rappelé mon voyage de 5 mois en Asie . Sur le moment, c’est dur de se rendre compte de ce que ça nous apporte et même si ça ne m’à transfiguré, ça nourri mon quotidien aujourd’hui. Et puis c’est une fierté de se dire « je l’ai fait alors que tant de gens veulent le faire et ne le feront jamais » bises :)
LaëtitiaAutrice
Oui je suis absolument d’accord ! Sur le moment, je ne prenais pas non plus la mesure de ce que ce voyage m’apportait et m’apporterait. En tout cas, quand j’en parle et que les gens témoignent l’envie de faire pareil (partir seul en l’occurrence), je fais mon max pour les pousser à réaliser leurs envies. Le monde serait bien plus joli si on concrétisait nos rêves :)
Maïté DM
Je crois qu’un long voyage seul ou accompagné (mine de rien être à deux pendant 6 mois ça pousse pas mal une relation dans ses retranchements) devrait être obligatoire tellement on se sent plus en paix après :-)
Maelys - Sunny Side Up
Quelle jolie expérience ! Merci pour le partage et bravo pour cet article si inspirant !
LaëtitiaAutrice
Merci beaucoup Maelys pour ton commentaire :)
Délia
Je suis peut-être une piètre voyageuse, mais je suis très avide de belles rencontres.
Au détour d’un aibnb j’ai pu découvrir une personnalité semblable à celle de Dori, et j’ai eu le sentiment qu’elle avait embelli ce qui devait n’être qu’un séjour dans une location en plein milieu de la France !
Partager avec des inconnus et se sentir proches de par des situations c’est tellement fort et humain!
J’aime beaucoup la précision de ce que tu nous décris, j’ai un peu le sentiment de partir à Bali ou de lire une nouvelle :)
J’ai hâte de lire ton dernier épisode, je pense qu’on pourra tous s’enrichir de tes réflexions!
Un bisou :)
LaëtitiaAutrice
Merci Délia ! Oui, les rencontres mêmes les plus courtes peuvent nous apporter beaucoup :)
Aurelia
Les civettes :-( La photo de l’animal c’est la tienne? Vous pouviez voir les animaux enfermés? (j’aurais pensé qu’ils les auraient cachés).
Et pour la passion des selfies avec les blanches, je compatis. C’est mon quotidien ici !
Bisous ma belle :)
LaëtitiaAutrice
Oui, c’est ma photo et les deux civettes de la plantation que l’on a visitée était « exposées » quasi à l’entrée… :/ Bisous ma chouquette <3
Mélody
Très beau récit, et très belles photos ! Toutes ces images me rappellent mon propre voyage à Bali. Bien qu’il n’ait été que purement touristique (j’y suis restée un mois, mes « vacances au milieu des vacances » lorsque j’étais en Australie), je prends beaucoup de plaisir à lire ton expérience. Je garde un excellent souvenir de l’accueil qui m’avait été réservé là-bas, et de la culture si riche. J’ai également visité une plantation de café et on m’a expliqué le fonctionnement de la production de Kopi Luwak mais c’est seulement en lisant ton article que j’ai réalisé quel maltraitance animale se cachait derrière. Présentée comme elle était à la plantation, ça ne m’a jamais effleurée que les civettes n’étaient peut-être pas bien traitées… Je suis naïve ! Bref, merci encore pour ce partage. Et belle journée à toi :)
LaëtitiaAutrice
Merci Melody pour ton commentaire :) Oui moi non plus, sur le moment je n’ai pas vraiment tilté même si la vue d’un animal enfermé n’est jamais de bon augure…
LaëtitiaAutrice
Mille mercis Fanny pour ton adorable commentaire ! Je suis absolument d’accord avec ce que tu dis : « les belles choses arrivent quand tu leur laisses l’opportunité d’entrer dans ta vie » <3
Le Bloc-Notes de Carmen
J’ai adoré ton article, il m’a fait voyagé et m’a à la fois inspiré.. Et ces belles photos..
Bonne semaine à toi et merci pour ce joli partage.
LaëtitiaAutrice
Merci beaucoup :)
Ocilia
J’adore tes récits de voyages avec les petites anecdotes. C’e n’est pas juste un récit factuel, tu nous livres tes impressions, tes sentiments sur certaines choses et ça rend le tout vivant.
En revanche je suis sous Safari sur Mac et je ne vois aucune des photos nommées Volontariat à Bali, surement à cause de l’accent :'(
LaëtitiaAutrice
Ah flûte ! J’ai checké sous Safari et je n’ai pas le problème non plus… Étrange :/ En tout cas merci pour ton adorable mot :)
Anne
Une jolie rencontre et de belles images.
Un goût de trop peu que je comprends pour ce pays!
Gladys
Je lis cet article avec pas mal de retard mais c’est encore une fois un plaisir à lire. Ta façon d’écrire est très entrainante et j’ai vraiment l’impression de vivre les moments que tu racontes avec toi! Je vais de ce pas lire ton article sur la 3e semaine !!
So
C’est vraiment un plaisir de te lire, tes touches d’humour sont super bien placées, j’adore!
Ça me donne très envie d’aller en Indonésie en tout cas!!
J’en profite pour te dire que tes photos sur Instagram sont magnifiques, je n’ai pas de compte alors je ne te suis pas mais je vais souvent regarder s’il y en a des nouvelles et je ne suis jamais déçue de ce que tu publies :-)